Taos Amrouche : Le recours à l’autofiction comme stratégie d’émancipation
Abstract
Cet article s’attache à mettre en perspective la relation entre la situation de la romancière — dans son rapport à la langue, à la féminité, à l’exil, à la religion — et la complexité de la forme littéraire choisie. Éternelle exilée, Taos Amrouche était tiraillée par l’attachement qu’elle portait à des pôles opposés. Une pensée binaire caractérisée par la nature antinomique de ce qu’elle préférait appeler le roman autobiographique, un genre à l’image de l’auteure : hybride. Marquée par de nombreuses ambivalences : partagée entre deux rives géographiques, entre le rejet et l’acceptation, la passion et le discernement, le réel et l’imaginaire, à la fois victime et bourreau, la romancière dévoile son authenticité à travers un dispositif autofictionnel lui-même ambigu. À la lumière des trois principaux romans : Jacinthe noire, Rue des tambourins et L’Amant imaginaire, nous tâcherons de comprendre dans quelles mesures l’énonciation autobiographique représentait un recours audacieux, et une démonstration irréfutable de la volonté de l’auteure de s’annihiler ou s’affabuler dans la multiplication des voix.